Pour fidéliser les jeunes dans l’entreprise, les employeurs de l’agroalimentaire doivent optimiser la phase d’intégration. Les cabinets Vague de sens et ManagerIA ont livré leurs conseils lors du CFIA 2022.
Lorsque qu'un jeune démissionne de son entreprise, dans près de 60 % des cas cela se fait durant la première année. Ce problème génère des pertes de temps et d’argent pour les employeurs confrontés à beaucoup de turn-over. Mais le phénomène n’est pas une fatalité. Des solutions existent. « Il est important d’accorder une grande place à la phase d’intégration », a préconisé Marlène Legay, psychosociologue et directrice du cabinet Vague de Sens, lors d’une table ronde organisée le 8 mars au CFIA par l’Ifria de l’Ouest, l’Abea et le site Jobalim, sur le thème « Comment optimiser l’intégration de la génération Z au sein des entreprises ». Pour elle, « les jeunes ont besoin d’être rassurés, considérés et qu’on leur offre un environnement sécurisé pour gagner en confiance. Ils sont pris entre l’envie d’agir et la crainte de ne pas y arriver ». Un avis partagé par Alex Brouillard, consultant au cabinet ManagerIA. « Les jeunes veulent relever des défis rapidement. Il faut leur offrir des opportunités durant l’intégration et leur donner de l’autonomie pour garder leur motivation intacte. Il ne faut pas rater ce temps de l’intégration. Cela va être crucial pour garder le jeune », estime-t-il.
Prendre le temps est une des clefs de la réussite de la phase d’intégration. « L’employeur doit veiller à faire en sorte que le jeune soit bien dès son premier jour : lui expliquer où il doit aller, qui il doit rencontrer et pourquoi pas lui envoyer quelques produits pour lui faire découvrir les produits de l’entreprise », estime Marlène Legay. Identifier les collègues auprès du nouvel arrivant et lui faire faire le tour des bureaux sont des initiatives intéressantes pour faciliter l’intégration, pour que le jeune sache vers qui se tourner en cas de questions.
Développer une relation pérenne
Ne pas mettre la pression sur les nouveaux arrivés est aussi un élément clef pour la motivation. « Il ne faut pas considérer que la personne va être tout de suite 100 % opérationnelle. Il faut prendre le temps d’accompagner la personne. Il faut sécuriser ce temps pour développer une relation pérenne. Sinon, on démotive les équipes et on perd la confiance des collaborateurs », poursuit Alex Brouillard.
La rémunération est aussi un facteur clef dans la bonne intégration des jeunes. Les autres secteurs industriels que l’agroalimentaire offrent souvent de meilleurs salaires d’entrée. « Il y a un vrai différentiel ente l’auto, l’aéro et la pharma par rapport à l’agro, de l’ordre de 10 à 20 %. Un salaire d’entrée dans l’aéronautique est autour de 35 000 euros contre 30 000 euros environ dans l’agro. Là où la passion pouvait contrebalancer avant le manque financier, aujourd’hui, les jeunes ingénieurs agros n’hésitent pas à se tourner vers d’autres secteurs en pointe, notamment vers l’environnement ou la chimie verte », observe Alex Brouillard. « Il y a souvent une incompréhension des jeunes diplômés vis-à-vis du niveau de leur premier salaire. En alternance, ils gagnent 1 500 euros par mois et seulement 1 600 euros une fois titularisé en CDI. Le différentiel est faible », souligne Marlène Legay. Pour les motiver, les entreprises de l’agroalimentaire doivent jouer sur d’autres arguments. « Il faut leur proposer de mener des projets, de transformation industrielle, de nouvelle usine ou d’innovation et donner du sens à leur fonction », estime le consultant de ManagerIA.
Les entreprises doivent retravailler leur image pour séduire les jeunes diplômés, en leur montrant toute la palette des possibilités offertes dans l’agroalimentaire. Cela doit être mieux pris en compte dès la formation en école, estiment les deux consultants. « Il y a un vrai décalage entre l’industrie agroalimentaire et l’image qu’en ont les jeunes. Rédéfinir la chaîne d’apprentissage pour montrer toute la palette des métiers est une priorité », recommande Marlène Legay. « La phase d’intégration doit donner des éléments de réassurance et de confiance pour rallumer la flamme et l’intérêt pour les IAA », insiste Alex Brouillard.
Adrien Cahuzac